DÉPRÉCIATION DU NAIRA : QUAND LA MONNAIE FRAGILISE L’ÉCONOMIE ET LA SOCIÉTÉ NIGÉRIANE

(Facteurs, impacts et pistes de solutions)

Le naira nigérian traverse une période particulièrement turbulente, marquée par une dépréciation continue et significative face aux principales devises internationales. Cette situation, loin d’être nouvelle, s’est intensifiée ces derniers mois, suscitant de vives inquiétudes au sein de l’économie nigériane et parmi sa population. Comprendre l’état actuel de cette dépréciation est crucial pour anticiper les défis futurs et évaluer les mesures potentielles de stabilisation.

Une Dépréciation Accélérée

Depuis l’adoption d’un régime de taux de change flottant géré en juin 2023, le naira a connu une chute spectaculaire. Alors qu’il se négociait autour de 470 nairas pour un dollar américain avant cette décision, il a franchi des seuils psychologiques les uns après les autres. Actuellement, le taux de change officiel est de 0,40 franc CFA pour 1 naira nigérian (NGN), tandis qu’en 2022, ce taux avoisinait 1 NGN = 1,4955 XAF. Ces chiffres démontrent clairement la dévaluation de la monnaie. Plusieurs facteurs contribuent à cette spirale descendante.

Les Causes de cette Dépréciation

Parmi les causes majeures, on peut pointer du doigt : La dépendance au pétrole : Le Nigeria repose historiquement sur les exportations de pétrole, dont la production fluctue en fonction des variations des prix du brut. Cette instabilité réduit les réserves de devises étrangères et limite la capacité de la Banque Centrale du Nigeria (CBN) à intervenir efficacement sur le marché pour soutenir le naira.

Une demande excessive de devises étrangères : Le besoin de dollars et d’autres devises pour financer les importations, les investissements et les transferts de fonds dépasse largement l’offre disponible, exerçant une pression constante à la baisse sur le naira.

La spéculation et l’arbitrage : L’écart important entre le taux de change officiel et celui du marché parallèle encourage la spéculation, exacerbant la volatilité et la dépréciation de la monnaie.

Les facteurs macroéconomiques : L’inflation persistante, le faible niveau d’investissement étranger direct et l’incertitude économique contribuent également à la faiblesse du naira. De plus, le manque de confiance dans les politiques économiques et monétaires des autorités pousse les investisseurs et les particuliers à vendre leurs nairas pour acheter des devises étrangères.

Les Impacts sur l’Économie

La dépréciation du naira a des conséquences majeures :

Une inflation galopante : La hausse du coût des biens importés, qu’il s’agisse de produits alimentaires ou de machines industrielles, accroît l’inflation et réduit le pouvoir d’achat des Nigérians.

Des difficultés pour les entreprises : Les sociétés dépendantes des importations font face à des coûts de production plus élevés, ce qui peut entraîner une baisse de la production, des suppressions d’emplois et une perte de compétitivité.

Un endettement extérieur plus lourd : La dette extérieure du Nigeria, libellée en devises étrangères, devient plus coûteuse à rembourser en termes de naira, ce qui aggrave la pression budgétaire du pays.

Un climat d’incertitude : La volatilité du taux de change dissuade les investisseurs et complique la planification économique à long terme.

Impact Social

L’augmentation du coût de la vie et la baisse du pouvoir d’achat exacerbent la pauvreté et les inégalités sociales, rendant les conditions de vie encore plus précaires pour de nombreuses familles nigérianes.

Des Solutions Possibles

Une stabilisation durable du naira nécessite une approche globale et cohérente :

Une gestion rigoureuse des finances publiques, combinée à un contrôle de l’inflation et à des taux d’intérêt attractifs, est essentielle pour rétablir la confiance dans la monnaie.

La diversification de l’économie : Réduire la dépendance aux exportations de pétrole en développant d’autres secteurs productifs permettrait d’augmenter les sources de devises étrangères.

Un environnement favorable à l’investissement : Des politiques économiques claires et transparentes sont cruciales pour attirer des capitaux et renforcer l’offre de devises.

Une communication stratégique : La Banque Centrale et le gouvernement doivent renforcer la transparence de leurs politiques monétaires et économiques pour restaurer la confiance du marché.

La dépréciation du naira est un défi de taille pour le Nigeria, mais une action concertée entre les acteurs économiques et les autorités publiques peut permettre de stabiliser la situation et d’assurer un avenir plus prospère.

Ablam AKODJEVO (Stag)